Enseigner c’est s’engager!

[Billet du Président, Le Français dans le Monde, n° 417, mai-juin 2018]

Quand on choisit de devenir enseignant, ne s’engage-t-on à transmettre aux autres, en particulier à la jeune génération, le gout et les moyens de découvrir, de comprendre, de penser, d’agir, de créer, bref de participer à la vie, avec la conviction que le savoir peut rendre les gens plus heureux et le monde meilleur ?

Quand on choisit de devenir enseignant de langue, ne s’engage-t-on à aider les élèves à apprécier, à connaitre, à maitriser les mots qui décrivent et façonnent les choses, et qui permettent de comprendre l’autre et s’entendre avec lui, avec la conviction que la communication peut rendre les gens plus heureux et le monde meilleur ?

Quand on choisit de devenir enseignant de langues et de cultures étrangères, ne s’engage-t-on pas à apporter sa contribution au dialogue au-delà de toutes les frontières, à apprendre à s’adapter aux différences et à s’en enrichir, avec la conviction que la diversité peut rendre les gens plus heureux et le monde meilleur ?

Quand on choisit de devenir professeur de français langue étrangère, ne s’engage-t-on pas à mettre à la disposition de ses apprenants toutes les ressources et les bénéfices de cette langue et des cultures auxquelles elle donne accès, avec la conviction que la francophonie peut rendre les gens plus heureux et le monde meilleur?

Quand on choisit de faire partie d’une association d’enseignants, ne s’engage-t-on pas à partager sa passion pour le métier, à échanger ses expériences, à collaborer à des projets communs, à s’intéresser aux problèmes des uns et des autres, avec la conviction que la solidarité peut rendre les gens plus heureux et le monde meilleur?

Quand on a le privilège d’avoir été choisi pour présider une fédération internationale de professeurs de français, on s’engage à aider ses collègues à exercer leur profession dans les meilleures conditions possibles et à défendre leur cause qui est celle du savoir, de la communication, de la diversité, de la francophonie, de la solidarité, avec la conviction que cette fédération peut rendre, un tant soit peu, ces enseignants plus heureux et leur monde meilleur.

C’est avec cette conviction que je m’engage aujourd’hui aux côtés de tous les enseignants et leurs élèves qui sont partout dans le monde victimes de violences, d’injustices, d’exactions de toutes sortes. Il ne se passe pas une semaine que les médias ne parlent de tueurs fous dans des lycées, d’écoles pillées par des soudards, de professeurs emprisonnés parce qu’ils font leur métier, d’étudiants expulsés faute de papiers, de classes de fortune dans des camps de réfugiés.

À l’heure où j’écris ce billet (vous voudrez bien m’excuser de ne pas y parler cette fois de projets pédagogiques), des bombes pleuvent jour après jour sur des écoles ainsi que sur des hôpitaux, et ce n’est pas faire de la politique que de s’insurger et de réclamer que cela cesse! Cela ne sert à rien, me dira-t-on! Probablement, mais j’ai la conviction que plus les enseignants manifesteront leur solidarité et leur indignation, en toute impartialité et en toute humanité, moins la vie de ces collègues et de ces étudiants sera désespérée et leur monde tragique.