Bon anniversaire à la FIPF!

[Discours prononcé à Sèvres, le mardi 21 mai 2019]

Mesdames et Messieurs en vos titres et qualités,

Chers Collègues, chers Partenaires, chers Collaborateurs,

Chères Amis et Amies,

 

C’est peu dire que c’est un grand honneur, mais aussi un grand plaisir, une grande fierté, une grande émotion surtout, que je ressens en prenant la parole devant vous à l’occasion du cinquantième anniversaire de la FIPF, surtout quand je prends conscience du nombre de personnes grâce auxquelles, au nom desquelles, pour lesquelles nous sommes réunis ici à quelques-uns pour célébrer cet événement. Cela donne le vertige ! Le Stade de France n’aurait probablement pas suffi pour les rassembler tous, quand bien même nous l’aurions réservé pour l’occasion. Aussi avons-nous encouragé tous nos collègues, nos collaborateurs, nos amis de par le monde à faire également la fête chez eux en pensant à nous au cours de cette année spéciale, comme nous faisons la fête aujourd’hui ici en pensant à eux, surtout à toutes ces enseignantes et à tous ces enseignants de français qui donnent tant à leur métier et à leur association, tant à leurs élèves et à leurs collègues, et tout autant à la langue française et à la francophonie à la vitalité, au rayonnement, à l’enrichissement desquelles ils travaillent sans répit. Non, tout compte fait, c’est une grande reconnaissance et une grande solidarité que j’éprouve d’abord !

En fait, je devrais commencer mon intervention par « il était une fois » parce que c’est ainsi que commencent toujours les belles histoires, et que la FIPF est effectivement une belle histoire. Auraient-ils jamais songé, ces quelques pionniers qui ont imaginé un jour une fédération internationale des professeurs de français que, cinquante ans plus tard, elle serait présente dans 120 pays, qu’elle compterait 200 associations, qu’elle réunirait 80.000 enseignants. Depuis lors, en cinquante ans, combien de rencontres, de colloques, de journées d’études, de stages de formation, de séminaires, de publications, de collaborations, d’échanges, de missions, de démarches, d’activités et de projets de toutes sortes organisés par et avec la FIPF ?  Depuis lors, en cinquante ans, combien de présidents, de vice-présidents, de secrétaires généraux, de responsables de commissions, d’associations, de projets, de collaborateurs, de sympathisants, de partenaires institutionnels, éducatifs, scientifiques, éditoriaux, commerciaux, qui, tous ensemble, petit à petit, au niveau local, national, régional, international, ont construit la FIPF que nous connaissons aujourd’hui ?

Sans l’engagement, le dévouement, l’entêtement, la générosité, l’ingéniosité, le charisme de toutes ces personnes, de la plus modeste à la plus illustre, nous ne serions pas ici et maintenant pour fêter cet anniversaire, tout simplement parce que la FIPF n’existerait pas, ou se réduirait un club de quelques militants passionnés. C’est donc d’abord à toutes ces femmes et ces hommes – dont plusieurs sont présents dans cette salle – qu’il faut rendre hommage, en nous réjouissant de pouvoir profiter de leur travail, de pouvoir nous inscrire dans cette histoire, y apporter notre petite contribution et continuer ainsi à la faire vivre.

Mais la FIPF n’est pas seulement une histoire. C’est également la réalité bien présente, bien actuelle, bien vivante d’un réseau de communication, de collaboration et de confraternité qui couvre la planète entière, sur les cinq continents. Le soleil ne se couche jamais sur la FIPF : quand certains confrères corrigent le soir les dissertations de leurs élèves, d’autres entament leur journée en écrivant la nouvelle date au tableau. Ce dynamique réseau est sans cesse irrigué par la communication que l’on renforce au cours des années et qu’on envisage d’encore d’améliorer et de diversifier, surtout à destination des jeunes générations. Quasiment en temps réel, on apprend ainsi qu’un colloque a lieu en Thaïlande et une journée de formation au Sénégal, qu’un appel à projets vient d’être lancé par l’OIF et la publication d’une revue par des collègues hollandais. En plus, ce réseau ne profite pas seulement aux enseignants et à leurs associations, mais aussi aux partenaires qui y trouvent, pour leurs initiatives en faveur de la francophonie, un extraordinaire relais multilatéral vers des interlocuteurs privilégiés.

Mais la FIPF n’est pas seulement un réseau. C’est également un organisme, peut-être plus dans le sens biologique qu’administratif  du terme : un assemblage, une combinaison, un ensemble d’éléments constituant un être vivant. À propos, s’il nous fallait choisir une mascotte (c’est curieux que l’on n’y ait encore jamais pensé ?), à l’araignée tisseuse et à la fourmi laborieuse, je préférerais l’abeille butineuse tellement la FIPF me fait souvent penser à une ruche. En franchissant les différents âges de la vie, la FIPF s’est étendue, s’est enracinée, s’est structurée, s’est associée à une multitude de partenaires pour devenir – dans le monde comme dans chaque pays – un acteur déterminant, entreprenant et fiable de la francophonie, et un atout essentiel pour son avenir. Comme tout organisme vivant qui se développe harmonieusement, la FIPF a toujours veillé à s’adapter aux différents environnements dans lesquels elle opère et aux différents publics auxquels elle s’adresse, la spécificité de la FIPF étant précisément d’intervenir au travers des associations pour apporter l’aide adéquate aux différents contextes institutionnels, culturels, humains.

Mais la FIPF n’est pas seulement un organisme. C’est également un précieux et efficace outil – une pince pour raccorder, une truelle pour construire, une bêche pour planter, un levier dans tous les autres cas – au service de notre corporation, des principes et des objectifs qui nous rassemblent et nous animent. Ce sont bien des stratégies que nous déployons et des actions que nous menons, aussi bien dans les bureaux que dans les classes, pour apporter notre contribution concrète et durable à un enseignement de qualité comme à un statut de qualité pour les enseignants qui ne sont malheureusement pas toujours bien considérés, encouragés, équipés. Nous travaillons aussi obstinément à promouvoir une certaine conception de la langue et de l’enseignement, en rappelant, en « martelant », puisque nous sommes toujours dans la boîte à outils, que l’enseignement doit viser l’épanouissement des apprenants, au-delà des objectifs spécifiques, dans une perspective humaniste, et que le français n’est pas seulement une nationalité et une langue, mais une communauté internationale, riche de cultures variées, forte de valeurs partagées, soucieuse de résister à une mondialisation uniformisante et aliénante.

Mais la FIPF n’est pas seulement un outil. C’est également un esprit, celui qui nous est parvenu des pionniers que j’évoquais tout à l’heure. Cet esprit, aussi primordial soit-il, j’aurai cependant de la peine à le décrire quand bien même je le ressens fortement chaque fois que je rencontre des groupes de collègues lors de mes missions à l’étranger, que je participe à des congrès, à des colloques, à des formations ou à des célébrations telles de celle-ci. C’est clair, la FIPF est à nulle autre pareille parce que l’enseignement n’est pas un métier comme les autres ; les langues, pas une matière comme les autres ; le français, pas une langue comme les autres. Et c’est cet esprit, cette chaleur humaine, cette convivialité confraternelle qui nous réunit tous, autant le professeur d’université que l’enseignant d’école, aussi bien le pédagogue à la pointe des plus récentes technologies que le virtuose de la craie blanche sans autre ressource, aussi bien le citadin habitué aux services culturels et aux réunions pédagogiques que l’enseignant isolé dans son village loin des universités et des ambassades. Le principal mérite de la FIPF est précisément de cultiver cet esprit chez tous ces collègues, de leur permettre de s’en inspirer dans les bons et les moins bons moments de leur vie professionnelle, et de le partager avec les autres à toutes les occasions.

Mais revenons à l’histoire de laquelle nous avons commencé à parler – forcément un jour comme aujourd’hui – en nous réjouissant de pouvoir en profiter encore, pour insister maintenant sur notre énorme responsabilité de tout faire pour la prolonger, pour la faire fructifier si possible. On sait que cette histoire n’a jamais été un fleuve tranquille, et plusieurs personnes ici présentes pourraient témoigner qu’ils ont plusieurs fois craint pour la survie de la FIPF. La question se pose une nouvelle fois de manière critique aujourd’hui. Tout porte à croire, à commencer par les chiffres, que nous sommes de nouveau à un tournant dangereux de cette histoire, serré et vertigineux, oserais-je dire. Au cours de ce mandat, nous avons dû amèrement constater que pour la FIPF non plus, le développement n’était pas synonyme de survie, et que l’on peut être victime de son succès, aussi paradoxal que cela puisse paraître de l’extérieur.

Ne vous inquiétez pas, nous n’allons pas faire passer une sébile comme à la fin de la messe ! Ne sortez pas non plus vos mouchoirs, un anniversaire comme celui-ci est surtout un moment de fête, même si c’est aussi l’occasion de prendre conscience de nos engagements vis-à-vis de nos aînés et surtout vis-à-vis de nos successeurs. Je suis convaincu que la FIPF surmontera ce défi majeur ; elle en a bien connu d’autres, nous l’avons dit. Le monde change, elle devra le faire aussi, par rapport à ses partenaires, parmi lesquels on devrait trouver plus de financiers, par rapport à ses commissions, qui devraient être plus autonomes, par rapport à ses affiliés, qui devraient être plus nombreux et surtout plus jeunes. Cette fois, elle devra cependant changer de manière plus radicale et plus rapide. Nous venons d’envisager de nouvelles perspectives avec le Bureau Exécutif Élargi (on en reparlera demain lors du Conseil d’Administration), et de fixer un mandat important pour les deux années cruciales à venir au nouveau Secrétaire Général, Marc Boisson. J’en profite d’ailleurs pour lui souhaiter la bienvenue, tout en remerciant le Secrétaire sortant, Stéphane Grivelet, pour le travail considérable accompli au cours des trois dernières années, et en lui souhaitant bonne chance pour la suite de sa carrière.

Dois-je dire qu’aussi compétent et efficace sera Marc Boisson, qu’aussi dynamique et dévouée sera toute l’équipe de la FIPF, nous aurons besoin de la confiance, de l’inspiration et de la collaboration de toutes les personnes ici réunies, des institutions, des organismes, des groupes que plusieurs d’entre vous représentent. J’aimerais donc terminer par vous témoigner à toutes et à tous, au nom de la FIPF, en ce jour à la fois joyeux et solennel de son cinquantième anniversaire, notre plus profonde gratitude pour le soutien que vous allez nous accorder demain comme pour celui que vous nous avez accordé au cours de toutes ces années passées.

Bon anniversaire à vous.

Bon anniversaire à la FIPF et longue vie à elle !