Quels que soit le sujet ou les circonstances, il semblerait qu’il y ait toujours une bonne et une mauvaise nouvelle à annoncer. C’est en tout cas ainsi que je formule ma réponse quand on me presse de donner un avis rapide et définitif (?) sur les méthodes d’apprentissage des langues étrangères.
Comme il se doit, je commence par la mauvaise nouvelle : contrairement à ce que certains éditeurs, certains établissements et même certains spécialistes prétendent ou espèrent, il n’existe pas et n’existera jamais de méthode miracle pour apprendre les langues, que ce soit en 90 leçons, en 15 jours ou à 5.000€/semaine. Le développement des programmes, des manuels, des logiciels, des théories n’y apportera pas grand-chose, à part la stimulation – à court terme – de la nouveauté. Au contraire, certaines sophistications pédagogiques ou technologiques risquent de distraire ou de déresponsabiliser les apprenants qui s’en remettent aveuglément. L’apprentissage d’une langue et d’une culture étrangères n’est pas un produit à acheter, ni même seulement une compétence à acquérir mais une expérience à vivre, patiemment, assidûment, attentivement, comme l’apprentissage artistique ou sportif. Ici moins qu’ailleurs, « le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui. » (L’homme pressé, Paul Morand)
La bonne nouvelle ? C’est qu’il n’y a pas vraiment de mauvaise méthode dans l’absolu, mais seulement des méthodes inappropriées. Quelles qu’elles soient, elles peuvent toutes servir à quelqu’un, à quelque chose, dans quelque circonstance, pourvu qu’elles soient utilisées à bon escient et surtout qu’elles encouragent la motivation des apprenants et de leurs enseignants. Car voici une certitude, qui n’est certainement pas une nouvelle même si on a tendance à l’oublier, à savoir que la méthode n’est rien sans l’envie et la volonté personnelles d’apprendre une langue, en particulier pour rencontrer d’autres personnes et découvrir d’autres cultures. Une autre certitude étant que, comme les régimes alimentaires, les méthodes d’apprentissage doivent être adaptées et variées tellement les facteurs en cause sont nombreux et les personnalités en jeu différentes.
Des étudiants dans les pires situations, sans les ressources, sans l’encadrement, sans les interactions que l’on juge actuellement indispensables – j’en rencontre souvent dans mes missions à l’étranger –, mais qui veulent apprendre malgré tout, y arrivent mieux que beaucoup d’autres à qui l’on offre ou impose cet apprentissage sur un plateau d’argent. Il ne s’agit évidemment pas ici de choisir entre le luxe et le dénuement, mais de rappeler la puissance et aussi la fragilité de la motivation qu’on ne peut jamais forcer, seulement susciter et cultiver. Et de rappeler par la même occasion le rôle primordial de l’enseignant qui est souvent à l’origine de cette motivation parce qu’il la ressent lui aussi. On a vu ce que cela pouvait donner quand on essaie de remplacer le professeur de langue par une machine, un enregistreur ou un ordinateur ; on risquerait beaucoup en l’enfermant aujourd’hui dans un cadre trop strict.